En matière de self défense (et aussi dans les arts martiaux et sports de combats, dans une certaine mesure), une des clés de la réussite est la gestion de la distance.
Un raisonnement simpliste, mais qui a sa validité, consiste en effet à dire que plus l'agresseur est loin, plus il a du mal à nous attaquer.
Voyons donc quelles sont les différentes distances :
1. Neutre : très grande distance à laquelle il est impossible d’attaquer à mains nues ou avec des armes autres que des armes de jet (arc, javelot, …) et des armes à feu. Cette distance peut déjà permettre cependant de voir venir le danger et de juger de son importance (1 ou plusieurs agresseurs) et donc d'agir (s'enfuir, changer de chemin, chercher un couvert, …)
2. Menace : Distance de plusieurs pas à laquelle l’agresseur n’est pas directement dangereux, mais à laquelle il est possible de scruter son comportement pour supposer un danger (cris, insultes, état d’ébriété, charge soudaine, mains cachées, propos incohérents, …) et agir (vigilance, déplacement, déploiement discret d'une arme improvisée, fuite, …)
3. Danger imminent : Distance à laquelle l’agresseur doit d’abord faire un pas avant de pouvoir attaquer. Distance de sécurité minimum à laquelle le défenseur devrait toujours idéalement se trouver dans une situation de self-défense. La distance d'un pas nécessaire à l'approche permet en effet de voir venir l'attaque (des membres supérieurs ou inférieurs via la vision périphérique) et de parer de manière réflexe (enfin, normalement !!)
4. Danger sérieux : Distance à laquelle l'agresseur peut attaquer sans avoir besoin d'avancer. Le temps de réaction devient dès lors très court, et il est très difficile de parer. Le champ visuel est également réduit (difficulté à voir sous la ligne de l'abdomen adverse, par exemple ses mains dans ses poches, ou ses jambes)
5. Danger létal : Distance très proches à laquelle les coups de coudes, de tête et de genoux peuvent partir sans que l'adversaire n'avance. Il est impossible d'avoir une réponse viable à une action adverse, le temps de réaction excédent le temps qu'il faut à l'action adverse pour nous atteindre.
Précision : ces différentes distances sont fonction de la taille de l'agresseur avant tout (moins de la votre), ainsi que de l’armement de l’agresseur : mains nues, couteau, bâton court ou long, (voire pistolet et fusil à lunette pour certains de nos lecteurs !)
Le problème survient quand il s'agit de passer de la théorie à la pratique : en effet, lors d'une altercation verbale, la tendance naturelle de l'agresseur va être de chercher la proximité :
- de manière "animale" pour un simple individu lambda, en nous imposant sa masse physique et en entrant dans notre distance de sécurité, pour nous intimider et nous jauger tout à la fois,
- et de manière réfléchie et calculée pour un "pro de l'embrouille", qui cherchera à maximiser les chances de réussite de ses attaques.
Face à cette intrusion, les conduites à tenir sont multiples :
- Adopter une plate-forme de combat viable, c'est-à-dire présentant à la fois une gestuelle apaisante tout en permettant de se protéger et de contre-attaquer (voire attaquer) facilement,
- En bougeant de manière à sortir de la ligne d'attaque centrale et en se plaçant plutôt de ¾ par rapport à l'adversaire, sur son côté droit ou gauche, ce qui rend plus difficile ses attaques, mais facilite les contre,
- En se déplaçant par un mouvement tournant circulaire si la pression est continue, afin d'éviter de reculer en ligne droite,
- En adaptant notre niveau de discours à la force de la menace,
- En adaptant notre gestuelle à notre niveau de discours, afin de présenter un tout cohérent,
- Eventuellement en profitant de la phase de dialogue pour avoir un coup d'avance : en repérant une possible issue de fuite, en préparant une arme improvisée, etc…
Il s'agit donc, et c'est la difficulté :
- De ne pas entrer dans la tendance naturelle qui consiste à rester de face, à bomber également le torse, à hausser la voix et à chercher le conflit, car cette attitude de défi nous prépare très mal à la défense,
- Ou à la tendance qui consiste à reculer en ligne droite, en ayant le regard focalisé sur les yeux de l'adversaire (effet de vision tunnel).
Pour cela une seule voie, l'entrainement avec des exercices verbaux et physiques appropriés.